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L’anglais, nouveau standard des litiges commerciaux en Allemagne à partir de 2025

  • Rodolphe Rous
  • 14 avr.
  • 2 min de lecture



La réforme allemande baptisée Justice Strengthening Act, entrée en vigueur le 1ᵉʳ avril 2025, marque une avancée majeure pour les entreprises internationales. Cette loi introduit des formations juridictionnelles dédiées, les Commercial Chambers et Commercial Courts, qui permettent désormais de mener des procédures commerciales intégralement en anglais, du dépôt des pièces au jugement final.


Avec cette initiative, l’Allemagne entend rivaliser avec les centres d’arbitrage internationaux en offrant un cadre judiciaire plus rapide et plus accessible, tout en conservant la transparence des jugements étatiques. Les Commercial Chambers, situées au sein de certains tribunaux judiciaires (Landgerichte), traitent les litiges d’une valeur jusqu’à 500 000 euros, tandis que les Commercial Courts, rattachées aux cours d’appel (Oberlandesgerichte), prennent en charge ceux d’au moins 500 000 euros. Si les décisions des Commercial Chambers sont susceptibles d’appel, les jugements des Commercial Courts ne peuvent faire l’objet que d’un recours en révision devant la Cour fédérale de justice (BGH), réduisant ainsi les délais et les coûts des procédures complexes.


Le Bade‑Wurtemberg a ouvert la voie avec ses Commercial Courts pilotes de Stuttgart et Mannheim, opérationnelles depuis 2020. En trois ans, ces tribunaux ont traité quelque 600 affaires internationales, dont de nombreux litiges M&A et B2B d’une valeur excédant un million d’euros. La durée moyenne des procédures – environ 6,5 mois – et le niveau d’expertise des juges ont convaincu le législateur de généraliser cette approche à l’échelle fédérale. Désormais, six Commercial Courts voient le jour à Düsseldorf, Hambourg, Francfort, Munich, Stuttgart et Berlin.


Outre la langue anglaise, la réforme introduit des règles spécifiques pour protéger les secrets d’affaires, notamment à travers des procès‑verbaux confidentiels. Elle impose également une audience d’organisation initiale qui structure le déroulement des débats, favorisant un règlement plus rapide et efficace des litiges. Cette réorganisation répond à une demande croissante des multinationales, qui privilégient la spécialisation et la prévisibilité des coûts. Les juges affectés aux Commercial Courts sont des experts chevronnés dans des domaines tels que le droit des sociétés, le transport ou la construction, renforçant encore l’attractivité de ces juridictions.


Cependant, certaines entreprises pourraient rester prudentes. En effet, le strict contrôle des conditions générales d’affaires (CGV) par le droit allemand, bien que garantissant une grande sécurité juridique, est parfois perçu comme trop rigoureux par des sociétés multinationales habituées à des contrats plus souples. De plus, la mise en place effective de ces nouvelles juridictions dépendra fortement des Länder, qui devront investir dans des ressources humaines, des équipements techniques et des services numériques modernes pour assurer leur succès.


Pour les entreprises françaises et internationales opérant en Allemagne, cette réforme est une opportunité à saisir. Une révision des clauses d’élection de for, l’intégration de la langue anglaise dans les contrats et une mise à jour des outils juridiques internes sont autant d’actions clés pour tirer parti de cette évolution. Si l’arbitrage demeure un choix pertinent pour certains litiges complexes ou hautement confidentiels, les nouveaux Commercial Courts offrent une alternative publique crédible, rapide et économiquement compétitive. Avec cette réforme, l’Allemagne renforce sa position comme un des principaux forums de règlement des litiges commerciaux en Europe.

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