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  • Rodolphe Rous

Résiliation du bail pour défaut de paiements postérieurs au jugement d’ouverture : précisions importantes





La résiliation d’un bail commercial pour défaut de paiement des loyers postérieurs au jugement d’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire est une question complexe qui requiert une attention particulière aux dispositions légales et à la jurisprudence. Un arrêt récent de la Cour de cassation, daté du 12 juin 2024, a apporté des précisions cruciales sur ce sujet. Cet article examine les faits, la procédure, et la décision de la Cour de cassation.


Contexte et Faits

Après la mise en redressement judiciaire d’une société, la bailleresse des locaux commerciaux loués à cette dernière a saisi le juge-commissaire pour faire constater la résiliation du bail en raison du non-paiement des loyers et charges afférents à une occupation postérieure au jugement d’ouverture. Le tribunal a arrêté un plan de redressement, et le juge-commissaire a rejeté la demande de résiliation du bail. La bailleresse a alors formé un pourvoi en cassation.


Procédure

Le tribunal administratif a rejeté la demande de la société tendant au rétablissement de son déficit et à la décharge des impositions supplémentaires. La cour administrative d'appel de Toulouse a rejeté l’appel formé contre ce jugement (CAA Toulouse, 20 juillet 2023, n° 21TL02338 N° Lexbase : A93121BI).


Principes Juridiques

L'article L. 622-14, 2° du Code de commerce, rendu applicable au redressement judiciaire par l'article L. 631-14 du même code, dispose que le juge-commissaire, saisi par le bailleur d'une demande de constat de la résiliation du bail pour défaut de paiement des loyers et charges afférents à une occupation postérieure au jugement d'ouverture, doit s'assurer, au jour où il statue, que des loyers et charges afférents à une occupation postérieure au jugement d'ouverture demeurent impayés. De plus, l'article R. 622-13, alinéa 2, rendu applicable au redressement judiciaire par l'article R. 631-20, précise les modalités de cette vérification.


Décision de la Cour de Cassation

La Cour de cassation a précisé que le juge-commissaire doit, au moment où il statue, vérifier que des loyers et charges postérieurs au jugement d’ouverture restent impayés. En l’espèce, la cour d’appel avait constaté que la débitrice avait payé les loyers échus postérieurement au jugement d'ouverture avant que la bailleresse ne saisisse le juge-commissaire pour résiliation du bail. Le paiement avait été effectué le 9 septembre 2020 et reçu le 10 septembre 2020, date à laquelle le juge-commissaire avait été saisi. La cour d’appel a donc rejeté la demande de résiliation du bail, considérant que les loyers avaient été acquittés.


Observations

La Cour de cassation a confirmé que, pour constater la résiliation du bail, le juge-commissaire doit s'assurer que les conditions de la résiliation sont réunies, notamment que les loyers postérieurs au jugement d’ouverture sont effectivement impayés. Cette décision rééquilibre les rapports bailleur/locataire en période de redressement judiciaire, en précisant que le paiement des loyers avant la saisine du juge-commissaire empêche la résiliation du bail.

La jurisprudence antérieure (Cass. com., 18 mai 2022, n° 20-22.164) avait déjà établi que le juge-commissaire devait se borner à constater la résiliation du bail si les conditions en étaient réunies, sans accorder de délais de paiement. Cet arrêt du 12 juin 2024 réitère et précise cette position, garantissant une application rigoureuse des dispositions légales tout en protégeant les droits des locataires en difficulté.


Conclusion

L’arrêt du 12 juin 2024 apporte des précisions importantes sur les conditions de résiliation d’un bail pour non-paiement des loyers postérieurs au jugement d’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire. Il clarifie le rôle du juge-commissaire et souligne la nécessité pour le bailleur de prouver que les loyers restent impayés au moment de la saisine. Cette décision contribue à un équilibre juste entre les droits des bailleurs et la protection des locataires en redressement judiciaire.


Sources

  1. Cour de cassation, Chambre commerciale, 12 juin 2024, n° 22-24.177.

  2. Code de commerce, article L. 622-14, 2° et article L. 631-14.

  3. Code de commerce, article R. 622-13, alinéa 2 et article R. 631-20.

  4. Cour d’appel de Paris, 22 septembre 2022, n° 21/14862.

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